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LES TECHNIQUES DE MANIPULATION DES MASSES

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On appelle « techniques de manipulation des masses », l’ensemble des moyens d’influence permettant la manipulation de l’opinion publique à des fins politiques, économiques ou stratégiques. On peut quelque qu’en soit sa forme, l’assimiler à une arme psychologique absolue, qui peut être dirigée vers son propre groupe (par exemple en y attisant les schismes); ou bien encore vers un autre groupe afin d’en prendre le contrôle ou du moins y semer le désordre. Il existe deux moyens de faire la guerre: le premier est le recours à la force, l’autre beaucoup plus subtil est le recours aux techniques de manipulation. Une des formes courantes de cet art manipulatoire est d’altérer le comportement d’une cible choisie en modifiant sa perception du réel. Le but à atteindre étant toujours de garder une solide emprise sur la cible par une situation de dépendance psychologique et matérielle.

Techniques de manipulation des masses

INTRODUCTION

Des premières traces de civilisation jusqu’à aujourd’hui, toute entité politique (état, tribu, groupe) a cherché à obtenir ou à maintenir le pouvoir. Puisqu’il y a plusieurs entités avec des valeurs différentes, inévitablement, certains vont entrer en conflit entre eux cherchant à étendre la grandeur de leur territoire ou à imposer leur politique. De plus, les dirigeants de l’état doivent garder leur emprise sur la population qu’ils contrôlent et éviter de se faire ravir le pouvoir par d’autres groupes qui pourraient chercher à le prendre.

Une façon de gérer son pouvoir et de chercher à en acquérir plus consiste à utiliser la force militaire. Une autre approche consiste en l’emploi intentionnel d’action psychologique (McLaurin, 1982). L’action psychologique (psychological operations ou PSYOPS) comprends toute forme d’action planifiée prise pour affecter la perception ou le comportement d’une cible politique choisie sans l’usage de force militaire (Bloom, 1991 ; McLaurin, 1982). L’action psychologique s’inscrit dans le cadre des relations internationales dans la mesure où un état tente d’imposer sa volonté sur un autre état (McLaurin, 1982).

Sun Tzu était un général chinois qui vécut 3 siècles avant J-C. Il écrivit un texte nommé l’art de la guerre. Son texte traitait à la fois de tactique de combat et de technique d’influence. Pour lui,  » Ceux qui sont experts dans l’art de la guerre soumettent l’armée ennemie sans combat. Ils prennent les villes sans donner l’assaut et renversent un état sans opération prolongées.  » (p.27 ; voir Volkoff, 1986). Les préceptes de son texte touchant les techniques d’influence sont nombreux, en voici quelques une : discréditer les chefs, désorganiser l’autorité, ridiculiser les traditions, semer la discorde entre les citoyens, perturber l’économie, répandre l’immoralité et la débauche, utiliser les hommes vils et dresser les jeunes contre les vieux.

Le but de ce texte est de décrire les différentes techniques d’influence ainsi que les méthodes utilisées pour les planifier. La première partie consistera en la description des trois grandes catégories d’actions psychologiques (propagande, désinformation et mesure active) ainsi que certaines de leurs applications. Ensuite, la deuxième partie consistera en une description des moyens utilisés pour planifier une propagande ou une désinformation ainsi que pour mesurer les effets de diverses actions psychologiques. 


ACTION PSYCHOLOGIQUE

Comme mentionné précédemment, l’action psychologique (psychological operations) est définis comme l’utilisation planifiée ou programmée de toutes formes d’actions humaines non coercitives désignées pour influencer les attitudes ou les actions des groupes ennemis, neutres ou alliés de manière à servir les intérêts nationaux (McLaurin, 1982). Il s’agit donc d’affecter les comportements d’une cible par l’intermédiaire des cognitions ou des émotions. Les actions psychologiques ont pour but soit de changer les perceptions des dirigeants ennemis sur nos intentions, soit de modifier les attitudes de la population et des soldats ou soit de supporter des mouvements qui suivent les intérêts de l’acteur. La cible des actions détermine si celles-ci ont un caractère offensif ou défensif (McLaurin, 1982). Lorsque les destinataires sont étrangers l’action est dite offensive alors que lorsque l’action est dirigée vers sa propre population elle est dite défensive (Durandin, 1993). Son utilisation n’est pas seulement en temps de guerre, ce qui tend à nuancer les définitions classiques de guerres et de paix (McLaurin, 1982).

Bloom (1991) donne 7 raisons rendant les actions psychologiques plus avantageuse que l’usage de la force pour atteindre des objectifs :

  1. elles sont moins dispendieuses, 
  2. elles permettent d’atteindre un plus grand nombre d’objectifs, 
  3. toutes actions ou situations ont des significations psychologiques qui peuvent être utilisées par les actions psychologiques, 
  4. la population est peu favorable à l’usage de la force et les actions psychologiques deviennent un moyen populaire d’imposer ses politiques, 
  5. les dilemmes de sécurité sont des phénomènes psychologiques qui peuvent avoir plus d’effet sur les actions de l’antagoniste qu’une démonstration de force, 
  6. les actions psychologiques permettent d’atteindre des objectifs sans perte de vie et 
  7. les actions psychologiques peuvent être implantées sans que la cible s’en aperçoive. 

Bloom (1991) distingue deux types d’actions psychologiques : la propagande et les mesures actives. Pour ce travail la désinformation a été considérée comme un troisième type d’action psychologique car elle peut servir à la fois à appuyer la propagande et les mesures actives, mais aussi être une opération en elle même. En temps de guerre, ces trois actions peuvent venir à se confondre et la délimitation entre les trois devient nébuleuse. 


LA PROPAGANDE

La propagande est définie par Linebarger (1972) comme n’importe quelle sorte de communication sans moyen violent utilisé pour modifier l’opinion, l’attitude, les émotions ou les comportements de n’importe quel groupe dans le but de favoriser l’utilisateur (militaire ou non) directement ou indirectement. Pour Bloom (1991), il s’agit de stimuli (signe et symbole) qui transportent un message via un média de communication. La plupart des techniques de propagandes actuelle se sont développé aux cours des deux guerres mondiales (Jowett, 1987)

Bien que les méthodes de propagandes et de publicité tendent de plus en plus à se ressembler (études de marché, population cible, etc..), Durandin (1993) la distingue de la publicité par le seul fait qu’elle porte un message politique, idéologique ou d’intérêts publics plutôt que commercial et qu’elle laisse moins de place aux  » free will  » pour se manifester.

Selon Durandin (1993), la propagande utilise des informations pour exercer une influence sur les attitudes. Ces informations visent à amener une modification du traitement de l’information chez l’individu afin de lui faire percevoir la réalité autrement (Durandin, 1993). Le propagandiste espère modifier la conduite à partir de ce changement de perceptions ou d’opinion. (Durandin, 1993) La propagande a pour but d’exercer une influence sur l’individu ou sur un groupe soit pour le faire agir dans un sens donné ou soit pour le rendre passif et le dissuader de s’opposer à certaines actions (Durandin, 1993). Par sa dépendance envers des informations, la différence entre la désinformation et la propagande est mince.

Bien que pour Bloom (1991) le message véhiculé doit être véridique en majeure partie, le propagandiste peut ajouter de la désinformation à sa propagande soit en ajoutant/inventant des informations confirmant sa thèse ou soit en cachant des informations qui infirme sa thèse. Par contre la propagande se distingue de la désinformation par le fait qu’elle n’est pas toujours mensongère. En effet, dire la vérité est souvent plus simple que de mentir. De plus, selon McLaurin (1982), cela permet de garder la confiance de sa population et de réduire la méfiance de l’antagoniste. D’autre part, la désinformation a l’inconvénient de faire perdre toute crédibilité à l’émetteur si le mensonge est exposé au grand jour.

Suite à l’usage qu’en ont fait Hitler et Staline, la propagande possède maintenant une connotation négative. Certains auteurs (par exemple Fuller, 1920 ; voir McLaurin 1982) la décrivent comme étant une corruption de la raison humaine, un minage de l’intellect, une désintégration du moral et de la vie spirituelle d’une nation par la volonté d’une autre. Il n’empêche néanmoins que l’utilisation de propagande est encore très contemporaine ( message d’intérêts publics sur les paquets de cigarettes, message de Patrimoine Canada, etc.). 


MODELES

Modele de Tchakhotine

Tchakhotine (1952, voir Volkoff, 1986) en s’appuyant sur la théorie des réflexes conditionnés de Pavlov, ainsi que sur une classification des pulsions humaines a analysé les mécanismes de la manipulation propagandiste. Selon lui, d’une manière générale, le succès de la propagande dépend de l’habileté du propagandiste à associer un des thèmes qu’elle développe à une des quatre pulsions majeures de l’être humain (agressivité, satisfaction matérielle, désir sexuel, amour parental ). L’individu soumis à ces pulsions agirait de façon inconsciente conformément à ce qui lui a été dicté. En étudiant les différentes entreprises de propagande, Tchakhotine fut amené à remarquer l’importance de l’utilisation judicieuse des symboles psychologiques (hymnes, logo, etc.) qu’il considère comme la clef de la propagande. Les symboles fonctionnent non seulement comme un signe de reconnaissance entre individus se réclamant d’une même communauté de pensée, mais aussi comme stimulus conditionnel . Les exemples de propagande ayant recours à un symbole sont extrêmement nombreux . Le symbole frappe et suggère sans informer, il fait appel à l’émotivité. De plus, selon cet auteur, environ 10% de la population (les  » actifs « ) ne serait pas susceptible a être influencé par la propagande. Pour convaincre ces  » actifs  » le propagandiste devrait développer des arguments très forts. Par contre, il note que 90 % de la population sont susceptibles à la propagande (les passifs) et que cela est amplement suffisant pour atteindre une majorité.

Propagande fasciste

Clyde Miller (voir Vorkoff, 1986) a établit des lois concernant le bon déroulement de la propagande fasciste:

1- suggérer la peur et faire ensuite entrevoir la possibilité d’atteindre la sécurité par les actions suggérées,

2- mettre les nouvelles idées en relation avec des idées qui leur sont coutumière pour les faire accepter par les masses,

3- avoir un nombre relativement restreint de formules tranchantes et concises afin qu’ils deviennent des symboles,

4- sans cesse exposer la population à la propagande,

5- appuyer la force à la propagande pour empêcher les autres idées de s’exprimer,

6- employer l’exagération et

7- adapter la propagande en fonction de l’auditoire auquel ont s’adresse.

Bien que ce type de propagande soit de moins en moins influent à cause des nouveaux moyens de télécommunication, il est intéressant de noter qu’en Italie, présentement, Silvio Berlusconi du parti Forza Italia (voir Almeida, 1995) emploie une bonne majorité de ces techniques pour faire valoir sont parti politique.

Les propagandes varient en fonction de leurs cible. Les propagandes stratégiques sont celles qui visent les populations civiles (McLaurin, 1982). C’est la vision traditionnelle de la propagande. Les propagandes tactiques sont celles qui s’adressent à un auditoire militaire (McLaurin, 1982). 


PROPAGANDE STRATEGIQUE

La propagande stratégique (ou guerre politique) concerne les stratégies de communication et de politique nationale ayant pour but de faire la promotion à la population adverse ou alliée que leurs intérêts sont mieux servis avec le pays (McLaurin, 1982). Les objectifs de cette forme de propagande visent à influencer les individus des populations qui ont des attitudes moins extrémistes (les passifs de Tchakhotine) et dont leurs actions peuvent faire une différence (McLaurin, 1982). Les objectifs de la propagande stratégique sont généralement à long terme (changer les attitudes des individus). Elle peut s’allier à la désinformation quand elle tente d’exposer au maximum ses forces, de cacher ses faiblesses et de faire croire que les intérêts du pays vont en fonction du bien-être de l’humanité (Lerner, 1972).

Pour modifier les attitudes à un niveau défensif, le propagandiste expose les avantages de sa politique étrangère tout en cachant ses inconvénients (Lerner, 1972). Les messages transmis visent à influencer l’opinion publique de son pays soit pour justifier les actions du gouvernement, soit pour augmenter le moral de la population ou soit pour favoriser l’appui de la population envers le gouvernement (Lerner, 1972). Afin d’acquérir la vertu et donc le support de sa population, il est important de faire percevoir à celle-ci que les ennemis sont soit des sous-humains, soit le mal incarné ou soit normal, mais mal dirigé (Linebarger, 1972). Le gouvernement peut désinformer la population avec l’aide de la propagande pour :

1- éviter de renseigner l’ennemi ou de désinformer l’ennemi par le biais des renseignements donnés à notre population,

2- ne pas démoraliser la population en leur donnant de mauvaises nouvelles,

3- ne pas réduire la production en leur donnant de trop bonnes nouvelles ( » ça ne sert plus à rien de se forcer, on gagne « ) et

4- pour cacher les crimes de guerres ou les actions moins honorables (Durandin, 1993).

Dans sa version offensive, ce type de propagande permet d’améliorer le succès d’une campagne militaire en brisant la volonté de résister d’une population sans tout détruire dans le pays (Lerner, 1972). Les messages visent à délégitimer les actions de leur gouvernement, baisser le morale et réduire les appuies de la population envers le gouvernement antagoniste (Lerner, 1972). La population ennemie est une cible intéressante car

1- elle influence l’élite aux pouvoirs,

2- elle est le moteur principal de production,

3- elle peut supporter des groupes subversifs au pouvoir établi et

4- elle soutient le moral des soldats en permission (Lerner, 1972).

En aucun cas une propagande ne sera efficace si on attaque l’idéologie d’un système car c’est ce qui donne un sens à la réalité de la masse (Linebarger,1972). Plus un régime est dictatorial, plus il contrôle les communications et moins il tolère que d’autre idéologie soit discutée (Volkoff,1986). Il est important que la propagande ne soit pas trop loin de la construction que la population s’est faite de la réalité (McLaurin, 1982). De plus, pour éviter que les actions coercitives fassent mauvaise publicité, le propagandiste peut affirmer que le conflit n’est pas contre la population mais contre ses dirigeants (Lerner, 1972). Ce processus amène une dissociation population/élite qui divise la société en plus de provoquer des doutes sur leur dirigeant.

Les propagandes stratégique se classifient aussi selon le degré auquel leur source est cachée (Volkoff,1986 ; Durandin, 1993). La propagande blanche est celle qui ne cache pas son origine, tandis que la propagande noire cache son origine et ment quant à la provenance des informations. La propagande blanche est généralement plus efficace en temps de paix, mais en temps de guerre les populations adverses sont plus méfiantes des  » propagandes  » provenant de d’autres pays. En temps de guerre la propagande noire est beaucoup plus vraisemblable car la population croit que les messages proviennent de source sure et amie (Durandin, 1993). Par contre, Volkoff (1986) affirme que la propagande noire n’est pas sans désavantage :

1- elle prend du temps à devenir efficace car le propagandiste doit établir sa crédibilité,

2- elle risque de désinformer son propre coté et

3- si découvert, ce type de propagande perds toute crédibilité.

Il est important pour se rendre crédible, dans ce type de propagande, d’affirmer plus de vrai que de faux (Durandin, 1993). La propagande noire sert souvent à propager de fausses informations et se rapproche donc énormément de la désinformation. 


PROPAGANDE TACTIQUE

Bien que toute action militaire provoque des réponses psychologiques ( affect de peur, baisse de morale, stress, etc.) intentionnellement ou non , il ne s’agit pas de propagande tactique (McLaurin, 1982). La propagande tactique ou guerre psychologique implique toute forme de communication utilisée pour faire support aux combats et pour modifier le rapport de force par son influence sur les esprits (McLaurin, 1982). Elle supporte soit en:

1- informant l’adversaire sur les procédures à suivre pour se rendre ,

2- augmentant l’impact des armes puissantes,

3- baissant le morale des troupes en faisant croire la défaite inévitable,

4- supportant les partisans alliés,

5- instiguant du stress ,

6- contrôlant les civils (n’allez pas sur la plage, il y a des combats) et

7- en contre-attaquant la propagande ennemie en affirmant que s’ils se rendent, les soldats seront bien traités (McLaurin, 1982).

Les objectifs ciblés par une telle pratique sont à court terme, ils ne visent pas un changement d’attitude et, de plus, ils peuvent dans certains cas être en contradiction avec les objectifs politiques (McLaurin, 1982).

Ce type de propagande s’adresse obligatoirement à un auditoire hostile, donc Katz ( voir McLaurin,1982) affirme que la propagande doit être véridique afin d’éviter de perdre toute crédibilité suite a de fausses affirmations. De plus, elle doit être employée conjointement avec l’usage de la force car seul, elle est inutile (Katz, voir McLaurin, 1982). Son usage est limité aux moments victorieux car le message n’a aucune crédibilité si les soldats croient qu’ils ont l’avantage au combat. Katz ( voir MacLaurin, 1982) suggère d’éviter le ridicule car il n’y a pas de place à l’humour au front. Il propose aussi de ne pas teinter le message de saveur idéologique car l’idéologie a peu d’impact dans une situation de survie. Il affirme aussi que les messages essayant d’instiguer la peur sont inefficaces envers des militaires car ceux-ci sont entraînés à contrôler leur peur. Par contre, ils seraient très utiles face à des civils. 


LA DÉSINFORMATION

La désinformation est la technique la plus complexe, mais aussi la plus difficile à classifier. Elle peut être utilisée comme action en soi ou comme support à une autre action que ce soit de manière offensive ou défensive. Ce concept provient du mot russe dezinformatzia qui signifiait dans l’encyclopédie russe de 1947 (voir Durandin, 1993)  » l’utilisation de la liberté de presse pour manipuler les masses  » (p.17). Montifroi (1994) la définit comme l’usage délibéré de l’information dans le but de fausser la perception de la réalité pour la cible. Elle vise soit à tromper l’antagoniste ou à influencer l’opinion publique soit en amenant la cible à comprendre certaines croyances qu’ils auraient autrement en aversion ou soit pour revendiquer un mensonge comme véridique(Montifroy, 1994). Pour Durandin (1993) il s’agit d’un mensonge organisé dans l’intention de tromper la cible en faveur de la politique étrangère de l’émetteur à une époque ou les moyens de diffusion de l’information sont omni-puissant.

Vorkoff (1986) pousse plus loin en affirmant que toute information a une teneur en désinformation par ce que l’individu est incapable d’atteindre l’exactitude dans ses perceptions et que chaque individu possède une appréciation relative de l’importance des choses. Une information possède deux éléments : le contenu de l’information et sa source. Il y a mensonge, et donc désinformation, quand un de ces deux éléments manque d’intégrité (Durandin, 1993).

La désinformation comme action vise principalement l’opinion mondiale et/ou l’opinion d’une population par l’utilisation de média de masse, mais pas les dirigeants (Volkoff , 1986). La manipulation des dirigeants se fait par l’entremise de l’opinion publique (Durandin, 1993). La désinformation comme support vise à renforcer l’effet des autres actions psychologiques soit en augmentant leur impact ou soit en favorisant leur caractère clandestin. Il est important à noter que la désinformation peut aussi être utilisée pour un bien commun . 


LES SIGNES

Les désinformations peuvent se classer (Durandin, 1993) par des procédés différents constitués des trois catégories suivantes : le signe, l’opération et les canaux : Les signes

Il peut y avoir plusieurs signes que l’on montre à la cible pour faire une désinformation : les paroles orales ou écrites, les images (photographies et films), les faux phénomènes, les fausses actions (manifestations prétendues spontanées) et les faux documents (contrefaçon). Si plusieurs signes différents qui s’accordent pour décrire le même mensonge l’effet de la désinformation augmente. Durandin (1993) note deux sortes de mensonges : tactique (mensonge visant modifier directement la conduite d’une cible) et médiatique (mensonge visant à modifier la conduite par l’intermédiaire de son image publique).

En plus de pouvoir présenter les mensonges en information factuelle, l’existence de mots fait croire à l’existence de chose, donc par le langage on peut instiguer un jugement d’existence et de valeur (Durandin,1993) . Trouver des mots qui portent est plus important que de transmettre des données objectives.

Le double langage est une sorte de désinformation qui utilise le langage comme signe. Il consiste à dire deux choses différentes à deux groupes différents à propos d’un même problème soit en isolant les deux destinataires ou soit en gardant la vérité qu’aux cadres de haut niveau (Durandin, 1993).

Le trucage des photos a été pendant longtemps très complexe et la photo devint un moyen très fidèle pour représenter la réalité. Par conséquent, elles sont devenues des instruments très vraisemblables pour faire croire une fausse réalité (Durandin, 1993). Aujourd’hui, avec les moyens d’infographie actuelle, toutes photos ou tous films peuvent être manipulés de n’importe quelle façon.

L’utilisation de faux document se fait soit en cachant/détruisant/substituant des documents ou en créant des faux documents ou en falsifiant les documents existants (Durandin, 1993). Les  » faux faux  » consistent à créer un faux document, le  » découvrir  » et ensuite en attribuer la provenance chez l’adversaire (Durandin, 1993). Un autre  » faux faux  » consiste à déformer sa signature de façon à se laisser une porte de sortie (  » Ceci n’est pas ma signature « ) si la situation devient désavantageuse (Durandin, 1993). L’utilisateur peut en faire soit un usage tactique (influencer le comportement de l’antagoniste) ou médiatique (nuire à la réputation de la cible) (Durandin, 1993). 


LES OPÉRATIONS

Les opérations constituent les diverses façons d’altérer la représentation de la réalité. Elle sont fonction du choix que le désinformateur fait des éléments à montrer ou non et fonction de sa thèse (Durandin, 1993). Ce dernier peut soit réduire des éléments (omission de faits, négation, minimisation ou suppression de trace), soit mettre en valeur des éléments (exagération, exhibition) ou soit faire une combinaison des deux (exagérer l’importance de certains faits et en omettre d’autres). S’il manque des éléments pour soutenir une thèse, le désinformateur peut en inventer. L’omission est l’opération la plus facile car il ne soulève pas de contradiction (Durandin, 1993).

La surprésentation est une technique donnant l’illusion de participer à l’activité et pouvoir faire quelque chose à la situation. Il suffit de présenter un maximum d’informations (souvent en direct) superflues afin de masquer les informations importantes (Durandin, 1993). Cette technique est abondamment utilisée sur CNN, et fut l’une des désinformations principales de la guerre du Golfe (Durandin, 1993) avec le contrôle des journalistes (McCormack, 1995) et des informations diffusées (Rakos, 1993) 


LES CANAUX

Les canaux sont les moyens utilisés pour transmettre la désinformation. Certains canaux visent la population dans son ensemble, tandis que d’autres ciblent des groupes spécifiques (Durandin, 1993). Les canaux qui touchent la population dans son ensemble sont : les médias de masses (presse, radio, films, télévisions, etc.), les communications informelles (rumeur, conversation), les organisations de masses (ONG, groupes communautaires), manifestation culturelle (fête, sports) ou des mouvements de masse ( mouvement écologique, pacifique, etc.). Les canaux qui ciblent des groupes spécifiques sont des périodiques spécialisés, des organisations professionnelles (congrès, etc.), des signes prétendus confidentiels, personnes influentes ou des agents d’influence (membre des services de renseignement). Les destinataires peuvent être atteint par plusieurs canaux ce qui augmente la crédibilité de la désinformation (Durandin, 1993).

En plaçant les actions psychologiques sur un continuum partant d’un extrême communication (propagande) et de l’autre un extrême opération directe (mesure active). L’usage des médias de masses à des fins de désinformation transpose celle-ci aux limites de la propagande tandis que l’usage d’agent d’influences aux limites des mesures actives. Les médias sont considérés par tous les auteurs comme une cible de premier choix pour la désinformation à des fins offensives ou défensives (Durandin, 1993 ; Volkoff, 1986 ; Montifroy, 1994). L’utilisation de journalistes est utile car :

  1. ils n’ont pas toujours le temps de vérifier leurs sources à cause du milieu extrêmement compétitif de leur emploi,
  2. ils sont facilement influençables (chantage, corruption),
  3. ils sont crédibles et
  4. ils ont accès à de vastes moyens de diffusion (Durandin, 1993).

Cette situation est le propre des sociétés permettant la liberté d’expression. Les sociétés ne laissant pas cette liberté sont à toute fin pratique immunisées contre la désinformation offensive (Volkoff, 1986).

Les journaux peuvent être un moyen de désinformation en temps de paix soit :

  1. en imitant un journal existant contenant de fausses nouvelles,
  2. en créant ou achetant un journal afin de présenter sa vision des choses,
  3. en subventionnant secrètement un journal,
  4. en utilisant des agents d’influence sur un journaliste ou
  5. par l’entremise de publi-propagande payée dans un journal à grand tirage (Durandin, 1993).

Les ondes radios ne sont pas soumises aux frontières entre les états. La désinformation peut se faire :

  1. en émettant à partir d’un poste radio d’un autre pays,
  2. en utilisant une onde très proche d’une station existante ou
  3. en achetant une radio existante en temps de paix (Durandin, 1993).

En temps de guerre la radio peut servir à démoraliser l’adversaire

  1. en lui donnant de fausses mauvaise nouvelle,
  2. en excitant les ennemis de nos ennemis ou
  3. en donnant de vraies informations militairement tactiques pour ensuite donner de fausses informations afin de tendre une embuscade (Durandin, 1993).

Ce type de diffusion est associé à la propagande noire. Aucun poste de télévision n’a été jusqu’à ce jour considérer noir, par contre le contenu de certaines émissions aurait put être influencé par certains agents occultes (Durandin, 1993).

L’acteur désinforme dans un journal ou une radio soit:

  1. en ne présentant que des nouvelles fausses pour lesquelles l’auditeur ne peut vérifier,
  2. en sélectionnant que des nouvelles allant dans le sens de ses intentions,
  3. en mélangeant des informations véritables et des informations fausses,
  4. en  » commentant  » des informations vraies,
  5. en exposant des nouvelles vraies avec des preuves concrètes dans un contexte qui en changent le sens,
  6. en grossissant et défigurant les informations vraies afin de susciter des sentiments forts chez les auditeurs,
  7. en donnant une répartition inégale de la longueur et de la qualité des informations,
  8. en habillant une information fausse avec un fait réel et
  9. en donnant l’information sans conclusion de façon à ce que l’auditeur fasse lui-même la conclusion qui s’impose (Durandin, 1993). Remarquez que certains journalistes utilisent ces techniques pour présenter leurs points de vue sans que cela paraisse.

OBJETS DE LA DÉSINFORMATION

La désinformation peut porter sur les faits, les intentions, les opinions, les valeurs ou sur les croyances/idéologies : Les faits touchent ce qui peut être observé par plusieurs personnes, que ce soit des comportements ou des situations. Plus les faits sont difficiles à connaître, plus il est facile de les déformer et moins il y a de témoins, plus le fait est propice à la désinformation (Durandin, 1993). Les événements passés et historiques sont donc facilement manipulés. Voici quelques moyens simples de tromper une cible avec des faits (Durandin, 1993):

  • Imaginer le futur à la place de la cible : le désinformateur peut présenter une possibilité du futur comme un fait afin d’aviver l’espoir ou pour créer de l’angoisse. 
  • Présenter des faits dans un format scientifique sans avoir de contenu scientifique est un moyen d’augmenter sa crédibilité en désinformant. 
  • Utiliser des estimations pour démoraliser l’ennemi à propos de ses performances 
  • Affirmer des bases idéologiques comme des faits pour donner raison à nos actes

Volkoff (1986) note que la vérité n’est pas toujours vraisemblable et que le mensonge a souvent une apparence plus véridique que la vérité. Une intention est un objet qui peut être facilement dissimulé particulièrement si elle est un projet d’agression (Durandin, 1993). Les moyens de cacher ses intentions sont simples : 1- ne pas en parler, 2- utiliser des termes vagues de façon à provoquer plusieurs analyses possibles, 3- faire semblant de respecter les valeurs d’autrui et 4- faire de faux plans pour ensuite les laisser  » découvrir  » par son antagoniste (Durandin, 1993).


LES MESURES ACTIVES

Les mesures actives comprennent toutes opérations directes visant à influencer les récepteurs (Bloom, 1991). Elles sont habituellement clandestines et exécutées par des services de renseignements (Bloom, 1991). Ces mesures peuvent être des assassinats, de la diplomatie coercitive , du chantage sexuel sur l’élite étrangère, du terrorisme, du soutien financier de partis politiques en dehors du pays, d’infiltration d’organisation de masses , de formation de spécialistes (guérilla/antiguérrilla), de sabotage ou d’aide international (Bloom, 1991).

Plusieurs de ces actions sont très coercitives par nature (par exemple un assassinat) et se trouvent à la limite de l’usage de la force militaire et de l’action psychologique. Ces mesures sont incluses comme actions psychologiques car elles visent une modification de comportements de la part de la cible (individu ou groupe) et non pas sa destruction pure et dure. L’assassinat d’un journaliste dans un pays se fait pour empêcher que les journalistes parlent d’un événement sous peine de mort et non pas dans le but qu’il arrête d’écrire. L’assassinat ne s’adresse pas à la victime mais à tous ceux qui sont similaires à elle. Il est bon de noter que ces mesures plus coercitives sont le fruits d’états n’étant pas démocratiques.

Plusieurs de ces actions sont supportées par la désinformation (cacher la source des actions ou les traces), par contre, les mesures actives n’utilisent pas obligatoirement le mensonge. L’assassinat d’un journaliste pour ne pas que les autres parlent ne contient pas de désinformation dans la mesure où l’état ne cache pas la source de ses actions. Un assassinat sur un journaliste dans un autre pays, que les instigateurs déclarent provenant d’un autre groupe contient de la désinformation. 


ASSASSINAT ET INTOXICATION

Assassinat

Un assassinat comme mesure active peut servir à :

  1. renforcer la perception des capacités militaires et de la volonté politique d’un groupe paramilitaire ou rebelle,
  2. tuer clandestinement certains de ses alliés pour ensuite condamner publiquement les  » massacres  » de son adversaire et ainsi prendre du capital politique,
  3. induire la peur à une élite scientifique ou corporative pour les empêcher de collaborer avec l’adversaire,
  4. assassiner un média afin de forcer les autres journalistes à ne pas aborder une question du problème et
  5. dans une dictature, utiliser l’assassinat pour instiguer la peur et maintenir le pouvoir (Bloom, 1991). 

L’intoxication

L’intoxication (ou désinformation tactique) est une autre forme de mesure active qui consiste à implanter de fausses informations dans les services de renseignements ennemis par l’entremise d’un intoxicateur (généralement un agent double) (Volkoff, 1986). Cette mesure consiste à faire croire aux dirigeants ennemis ce qu’il faudrait qu’il croit pour courir à sa perte soit sur le plan politique ou sur le plan militaire (Durandin, 1993). L’intoxication la plus efficace fut faite par les nazis envers Staline (Durandin, 1993) avant la deuxième grande guerre, en lui laissant croire que la majorité de l’état-major russe conspirait contre lui. Plus de 80 % des hauts gradés russes furent fusillés avant la guerre. 


LA SUBVERSION

La subversion est une action qui regroupe l’ensemble des moyens psychologiques ayant pour but le discrédit et la chute du pouvoir établi sur des territoires politiquement ou militairement convoités (Volkoff, 1986 ; Durandin, 1993). Elle vise à susciter un processus de dégénération de l’autorité pendant qu’un groupe désireux de prendre le pouvoir s’engagera dans une guerre  » révolutionnaire  » (Mucchieli, voir Volkoff, 1986). Un état peut utiliser la subversion afin de créer le chaos dans un pays étranger soit pour des raisons politiques ou militaires . Elle est la base du terrorisme et de la guérilla.

Les objectifs de la subversion sont : 

1-démoraliser la population et désintégrer les groupes qui la composent, 

2- discrédité l’autorité et 

3- neutraliser les masses pour empêcher toute intervention générale en faveur de l’ordre établi (Mucchieli, voir Volkoff, 1986). 

La subversion utilise les médias de masses pour manipuler l’opinion publique par l’entremise de la  » publicité  » que les nouvelles lui accordent après des actions spectaculaires (Mucchieli, voir Volkoff, 1986). Cette publicité survient car elle provoque chez l’auditeur un changement perceptuel envers les antagonistes comme une forme d’identification à l’agresseur (Mucchieli, voir Volkoff, 1986). Les autorités sont perçues de plus en plus faibles et irresponsables, tandis que les agents de subversion paraissent plus puissants et plus convaincus de leur cause (Mucchieli, voir Volkoff, 1986). L’opinion publique vacillera un jour du côté des agents subversifs . Sans oublier que les groupes subversifs peuvent utiliser la désinformation et la propagande dans les journaux et les radios leur appartenant pour renforcer la manipulation de l’opinion publique.

De plus, pour atteindre des groupes clefs, les agents subversifs peuvent utiliser plusieurs techniques en plus de la manipulation des médias de masse: 

1- intensifier les revendications légitimes, les besoins ou l’idéologie des groupes désignés,

2- forcer un sous groupes se présentant comme le champion des intérêts du groupe (modèle) à faire des actions directes,

3- mobilisation du groupe s’il y a attaque perpétrée contre un membre du groupe et finalement, 

4- la technique provoquation-répression-appel à l’unité contre la répression (Mucchieli, voir Volkoff, 1986). 

Cette dernière technique se fait en quatre temps : 

1 acte de brigandage pour forcer l’autorité à être répressive,

2- répression de l’autorité que l’acteur doit faire percevoir comme une menace collective pour le groupe, 

3- augmenté le niveau de violence des actions afin d’augmenter la répression de façon circulaire et 

4- appel au front commun contre la répression en culpabilisant l’autorité et en justifiant les actes de brigandages du départ (Mucchieli, voir Volkoff, 1986). 


LA PLANIFICATION D’ACTION PSYCHOLOGIQUE

La planification est un aspect essentiel de toute action psychologique. Les actions doivent avoir des objectifs précis. La prochaine section aborde les méthodes de planification de propagande et de désinformation, les mesures d’efficacités des propagandes et les facteurs à considérer lors de l’élaboration de propagande et de désinformation. Aucune des sources consulté ne parlait de planification de mesures actives.

La première étape à toute action psychologique est la recherche de renseignement (McLaurin, 1982). Celle-ci peut se faire grâce à des techniques de recherche de marché (sondage d’opinion, etc.), entrevue, interrogatoire ou de l’analyse de contenus de documents. Ces techniques peuvent provenir de sources d’information variées : des renseignements humains (prisonnier de guerre, civil ennemi ou allié, réfugié), de renseignements électroniques (écoute électronique, interception de données informatiques), des documents capturés, des experts ou par une revue de littérature (rapport de renseignement, périodique/livres, propagande ennemie, média de masse, études spéciales) (McLaurin, 1982). La recherche de renseignement vise à : 

1- définir les audiences clefs dans une population, 

2- évaluer les attitudes et les motivations des gens, 

3- analyser les vulnérabilités d’audience spécifiques et 

4- déterminer le meilleur moyen d’atteindre ses objectifs (McLaurin, 1982).

La deuxième étape d’une propagande consiste à choisir le contenu du message, les moyens de communications et les techniques utilisées en fonction des objectifs, de la situation et de l’audience ciblée (McLaurin, 1982). Il est important que le contenu du message soit cohérent avec ce que les gens croient (Lerner, 1972). La troisième étape consiste à planifier la logistique nécessaire et à transmettre la propagande (McLaurin, 1982).

Le propagandiste doit tenir compte de plusieurs facteurs pour élaborer son message. Ce dernier doit : 

1- attirer l’attention, 

2- être compréhensible par la cible, 

3- ne pas l’offenser,

4- activer des besoins individuels et fondamentaux et 

5- proposer une réponse pour une collectivité car les comportements sont fortement influencés par son rôle et son groupe de pairs (McLaurin, 1982). 

Les facteurs de persuasion sont les mêmes qu’en publicité :

1- la source doit être crédible, prestigieuse et/ou similaire à la cible ,

2- le contenu dépend des objectifs, mais il doit être semblable aux attitudes de la cible , 

3- de façon générale, les masses médias sont plus efficaces et

4- l’audience cible doit être celui ayant les attitudes les moins prononcées (Bloom, 1991 ; McLaurin, 1982).

Pour pouvoir faire une désinformation, il faut tout d’abord que les renseignements obtenus démontrent que les cibles sont susceptibles a être affectée par une désinformation. Cette susceptibilité provient de :

1- une cible apte à être déformée, 

2- un état d’esprit dans la population ou chez les dirigeants tel qu’il acceptera la désinformation comme légitime,

3- une désinformation qui doit correspondre avec leur préconception de la réalité ou leur mode, 

4- avoir des canaux de désinformation crédible et bien établis et 5- la cible doit être convaincue que le désinformateur ne peut pas l’atteindre (Montifroy, 1994).

Pour les services de désinformations Tchécoslovaques (Bittman ; voir Volkoff, 1986), après le recueil de renseignement, les agents faisaient des propositions de désinformations. Les meilleures propositions étaient choisies en fonction des objectifs à long terme et étaient transmises par : des agents de renseignement, des agents doubles, des collaborateurs idéologiques ayant des postes influents ou par du matériel délivré de façon anonyme.

La dernière étape consiste à mesurer les effets d’une action (McLaurin, 1982). Les mêmes sources d’informations sont nécessaires que pendant la première étape. En temps de paix, les études de marchés sont simples à effectuer car elles sont faites sans crainte de contrôle gouvernemental (Durandin, 1993). En temps de guerre, la situation devient plus complexe à évaluer et plusieurs questions se posent. Quel critère utiliser pour mesurer l’effet d’une action psychologique, comment le mesurer et comment accéder à l’audience ciblée (McLaurin, 1982)? Le problème devient encore plus obscur lorsqu’on touche à la propagande militaire. La nature même de la guerre empêche de dire si les effets observés sont dut à la propagande ou bien tout simplement à l’action militaire (McLaurin, 1982). Les prisonniers de guerre sont souvent hostiles et refusent de répondre à des enquêtes sur l’efficacité d’une propagande. McLaurin (1982) propose que le propagandiste intègre un  » agent double  » à l’intérieur des prisonniers pour avoir des informations plus valides. Deux autres méthodes sont aussi proposées : interviewer à fond un très petit groupe d’individus ressemblant le plus à la population cible ou encore, questionner un  » juge  » qualifié qui connaît bien la population et la culture cible. Il est à noter que ces deux dernières méthodes comportent des biais.

Les effets de propagandes en temps de guerre peuvent être évalués de façon quantitative ou qualitative (McLaurin, 1982). Des exemples de critère quantitatif sont : le nombre de prisonniers de guerre, le nombre de déserteurs, le temps pour effectuer un rappel de la propagande, un sondage distribué aux prisonniers et le nombre de pamphlets ou d’heures de diffusion effectuées. L’analyse de contenu des communications ennemies, des interviews, des interrogatoires ou l’analyse des lettres des prisonniers sont des exemples de critères qualitatifs. 


CONCLUSION

Les façons d’influencer les adversaires sans utiliser de forces militaires n’ont pas si changé depuis Sun Tzu. L’action psychologique reste une alternative pour les états tentants de s’imposer en relation internationale que ce soit par l’utilisation de propagande, par la désinformation ou par des mesures actives. L’annexe 1 synthétise les principales techniques de chacune des trois catégories en fonction de leur nature soit offensive ou défensive et selon qu’elle s’adresse à une élite, à la population, aux militaires ou à des groupes/individus influents.

Bloom (1991) remarque que l’actions psychologiques est un sujet difficile à analyser parce qu’elle est difficile à identifier clairement à cause de sa nature clandestine. Selon lui, les auteur qui l’aborde présente plutôt leur jugement moral qu’un bagage de connaissance. De plus, les analyse rigoureuse de ce phénomène sont rarement publié dans des périodique civil. Si il y a des recherche systématique sur une forme d’action psychologique, les résultats sont gardés top-secret.

L’arrivée de l’informatique offre énormément de nouvelle possibilité aux actions psychologiques. En partant avec la prémisse que l’information est devenue une source de puissance et que nous sommes devenus tout à fait dépendant des systèmes informatiques, Schwartau (1993) décrit une nouvelle façon de faire la guerre, l’infoguerre. Il s’agit de toutes formes d’actions prises pour avoir une supériorité informationnelle soit en affectant les informations adverses, les processus basés sur l’information ou les systèmes informatiques (Schwartau, 1993). Toute son oeuvre présente de nouvelles techniques de désinformation et de mesures actives propre à la crise qu’engendre l’explosion des technologies de l’information. La mesure active primaire de son oeuvre est le piratage informatique qui peut être utilisé à des fins de sabotage, de criminalité ou de recherche d’informations confidentielles. De plus, parce que les gens croient qu’un ordinateur est un outil ne pouvant pas se tromper, l’autoroute de l’information devient un excellent lieu pour faire une désinformation afin de briser la réputation d’un individu en modifiant certains dossiers confidentiels peu protégés (crédit, dossier judiciaire, etc.).

 » L’usage efficace des moyens de communication constitue d’une façon générale un élément central pour la propagande et la désinformation. Le développement de réseaux informatiques mondiaux amplifie par son échelle, par sa puissance ainsi que par l’absence actuelle de toute législation internationale, le pouvoir de diffusion de toute forme de propagande/désinformation mais il est aussi une ligne de défense contre ceux-ci en laissant à tous une possibilité de s’exprimer.  » (propagande, article d’Encarta ; Microsoft, 1997) Ce travail a mis l’emphase sur les actions gouvernementales, mais une compagnie privée peut tout à fait utiliser certaines de ces techniques. Certaines formes de publicité se rapprochent de la propagande car elles ne visent pas à inciter un individu à acheter un produit mais à faire percevoir à la population que leurs actions sont pour le bien-être de tous. D’autre part, la désinformation scientifique peut empêcher un concurrent de faire des recherches sur certains terrains. Un spéculateur peut partir de fausses rumeurs ou faire sauter des bombes pour essayer faire baisser un titre à la bourse. De plus, les nouvelles armes de l’infoguerre offrent de bons moyens d’actions directe pour une compagnie (espionnage industriel, sabotage informatique, etc.).

Comme l’affirme Bloom (1991)  » Influence techniques will be perceived as more important by all who seek power. With worldwide increases in interdependance, communications technology, and the lethality and sophistication of weapons, propaganda and active measure will become more cost-effective and even more morally appealing  » (p.708). 

AUTRES TECHNIQUES DE MANIPULATION

1 – La stratégie de la diversion

Élément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informations insignifiantes. La stratégie de la diversion est également indispensable pour empêcher le public de s’intéresser aux connaissances essentielles, dans les domaines de la science, de l’économie, de la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique. « Garder l’attention du public distraite, loin des véritables problèmes sociaux, captivée par des sujets sans importance réelle. Garder le public occupé, occupé, occupé, sans aucun temps pour penser ; de retour à la ferme avec les autres animaux. » (extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »)

2 – Créer des problèmes, puis offrir des solutions

Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter. Par exemple : laisser se développer la violence urbaine, ou organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires au détriment de la liberté. Ou encore : créer une crise économique pour faire accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le démantèlement des services publics.

3 – La stratégie du dégradé

Pour faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans. C’est de cette façon que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles ont été imposées durant les années 1980 à 1990. Chômage massif, précarité, flexibilité, délocalisations, salaires n’assurant plus un revenu décent, autant de changements qui auraient provoqué une révolution s’ils avaient été appliqués brutalement.

4 – La stratégie du différé

Une autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat. D’abord parce que l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain » et que le sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour s’habituer à l’idée du changement et l’accepter avec résignation lorsque le moment sera venu. Exemple récent : le passage à l’Euro et la perte de la souveraineté monétaire et économique ont été acceptés par les pays Européens en 1994-95 pour une application en 2001. Autre exemple : les accords multilatéraux du FTAA que les USA ont imposé en 2001 aux pays du continent américain pourtant réticents, en concédant une application différée à 2005.

5 – S’adresser au public comme à des enfants en bas-âge

La plupart des publicités destinées au grand-public utilisent un discours, des arguments, des personnages, et un ton particulièrement infantilisant, souvent proche du débilitant, comme si le spectateur était un enfant en bas-âge ou un handicapé mental. Exemple typique : la campagne TV française pour le passage à l’Euro (« les jours euro »). Plus on cherchera à tromper le spectateur, plus on adoptera un ton infantilisant. Pourquoi ? « Si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens critique que celles d’une personne de 12 ans. » (cf. « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »)

6 – Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la réflexion

Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions, ou des comportements…

7 – Maintenir le public dans l’ignorance et la bêtise

Faire en sorte que le public soit incapable de comprendre les technologies et les méthodes utilisées pour son contrôle et son esclavage. « La qualité de l’éducation donnée aux classes inférieures doit être de la plus pauvre sorte, de telle sorte que le fossé de l’ignorance qui isole les classes inférieures des classes supérieures soit et demeure incompréhensible par les classes inférieures. » (cf. « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »)

8 – Encourager le public à se complaire dans la médiocrité

Encourager le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte…

9 – Remplacer la révolte par la culpabilité

Faire croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution !…

10 – Connaître les individus mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes

Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. Le système en est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les individus eux-mêmes.

Seconde partie qui elle aussi va vous rappeler certains exemples bien précis…Voici donc suivant wikipedia et l’auteur de cet article les méthodes utilisées et les messages possibles de la propagande:

La peur : un public qui a peur est en situation de réceptivité passive, et admet plus facilement l’idée qu’on veut lui inculquer. Par exemple, Joseph Goebbels a exploité la phrase de Théodore Kaufman, « l’Allemagne doit périr ! », pour affirmer que les Alliés ont pour but l’extermination du peuple allemand.

Appel à l’autorité : l’appel à l’autorité consiste à citer des personnages importants pour soutenir une idée, un argument, ou une ligne de conduite.

Témoignage : les témoignages sont des mentions, dans ou hors du contexte, particulièrement cités pour soutenir ou rejeter une politique, une action, un programme, ou une personnalité donnée. La réputation (ou le rôle : expert, figure publique respectée, etc.) de l’individu est aussi exploitée. Les témoignages marquent du sceau de la respectabilité le message de propagande.

Effet moutonnier : cet appel tente de persuader l’auditoire d’adopter une idée en insinuant qu’un mouvement de masse irrésistible est déjà engagé ailleurs pour cette idée. Comme tout le monde préfère être dans le camp des vainqueurs que dans la minorité qui sera écrasée, cette technique permet de préparer l’auditoire à suivre le propagandiste.

Redéfinition, révisionnisme : consiste à redéfinir des mots ou à falsifier l’histoire de façon partisane.

Obtenir la désapprobation : cette technique consiste à suggérer qu’une idée ou une action est adoptée par un groupe adverse, pour que l’auditoire désapprouve cette idée ou cette action sans vraiment l’étudier. Ainsi, si un groupe qui soutient une politique est mené à croire que les personnes indésirables, subversives, ou méprisables la soutiennent également, les membres du groupe sont plus enclins à changer d’avis.

Généralités éblouissantes et mots vertueux : les généralités peuvent provoquer une émotion intense dans l’auditoire. Par exemple, faire appel à l’amour de la patrie, au désir de paix, à la liberté, à la gloire, à la justice, à l’honneur, à la pureté, etc., permet de tuer l’esprit critique de l’auditoire. Même si ces mots et ces expressions sont des concepts dont les définitions varient selon les individus, leur connotation est toujours favorable. De sorte que, par association, les concepts et les programmes du propagandiste seront perçus comme tout aussi grandioses, bons, souhaitables et vertueux.

Imprécision intentionnelle : il s’agit de rapporter des faits en les déformant ou de citer des statistiques sans en indiquer les sources. L’intention est de donner au discours un contenu d’apparence scientifique, sans permettre d’analyser sa validité ou son applicabilité. Ces imprécisions peuvent se glisser dans le système juridique, sous forme d’un droit mou, poussant à la communication en vue d’obtenir des informations, tout en influençant l’opinion publique.

Transfert : cette technique sert à projeter les qualités positives ou négatives d’une personne, d’une entité, d’un objet ou d’une valeur (un individu, un groupe, une organisation, une nation, un patriotisme, etc.) sur un tiers, afin de rendre cette seconde entité plus (ou moins) acceptable. Cette technique est utilisée, par exemple, pour transférer le blâme d’un camp à l’autre, lors d’un conflit. Elle évoque une réponse émotive qui stimule la cible pour qu’elle s’identifie avec l’autorité reconnue.

Simplification exagérée : ce sont des généralités employées pour fournir des réponses simples à des problèmes sociaux, politiques, économiques, ou militaires complexes.

Quidam : pour gagner la confiance de son auditoire, le propagandiste emploie le niveau de langage et les manières (vêtements, gestes) d’une personne ordinaire. Par projection, l’auditoire est aussitôt plus enclin à accepter les positions du propagandiste, puisque celui-ci lui ressemble.

Stéréotyper ou étiqueter : cette technique utilise les préjugés et les stéréotypes de l’auditoire pour le pousser à rejeter l’objet de la campagne de propagande.

Bouc émissaire : en jetant l’anathème sur un individu ou un groupe d’individus, accusés à tort d’être responsables d’un problème réel (ou supposé), le propagandiste peut éviter de parler des vrais responsables, et n’a pas à approfondir le problème lui-même.

Slogans : un slogan est une brève expression, facile à mémoriser et donc à reconnaître, qui permet de laisser une trace dans tous les esprits.

Glissement sémantique : technique consistant à remplacer une expression par une autre afin de la décharger de tout contenu émotionnel et de la vider de son sens (euphémisme). Le glissement sémantique peut à l’inverse renforcer la force expressive pour mieux émouvoir l’auditoire. Exemples : « frappe aérienne » à la place de « bombardement », « dommages collatéraux » à la place de « victimes civiles », « libéralisme » à la place de « capitalisme », « loi de la jungle » à la place de « libéralisme », « solidarité » à la place d’« impôt », « pédagogie préventive » à la place de « répression policière », « intervention humanitaire préventive » à la place d’« intervention militaire ». 

LIRE : http://www.artdelaguerre.com/

SOURCE : http://lesmoutonsenrages.fr


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